Trois semaines folles!
Quand j’ai débarqué à l’aéroport de Boston, mille pensées
me traversaient l’esprit, il y avait tant de choses à
raconter, tellement de petits détails qui avaient de
l’importance à ce moment. Mais aujourd’hui, en
m’installant devant mon ordinateur pour vous écrire cette
chronique, que tout cela me paraît dérisoire, à la
lumière des événements récents.
Mais puisque j’ai le temps, puisque chacun de ces
moments a été si fort pour moi, je ne vais pas que parler
des attentats terroristes, mais commencer par le
commencement, mes premiers jours, et puis ensuite, le
choc et l’horreur de ce qui s’est passé dans le climat de
bonheur et d’excitation qui régnait dans ma vie.
Les premiers jours, découverte et installation…
Dans l’avion, en quittant la France, à la lumière
d’un lever de soleil sur les Alpes comme j’en ai rarement
vu (d’accord, j’en vois rarement !), je me disais que
oui, la France allait me manquer terriblement. Mais
j’avais à peine débarqué dans le tourbillon de l’aéroport
de Boston que je me suis prise au jeu : cette animation
incessante, ce ballet de bus énormes, de limousines et de
taxis étaient si étourdissants et si américains à la fois.
Bref, après un week-end de bonheur au bord de
l’océan, me voilà repartie, avec mes 60 kgs de sacs et
mon chat dans un nouveau bus, direction Providence.
Quelle petite ville superbe : un festival de petites
maisons anciennes, coquettes et colorées !
Mais l’heure n’était pas au tourisme : dès le lendemain,
nous voilà (deux autres français et moi) en train de
courir de réunion du département en démarches pratiques,
et aux heures perdues nous visitons tous les appartements
disponibles. Le défi de la semaine : tenir le rythme,
trouver un appartement joli, pas trop cher et bien situé,
de préférence en colocation avec des Américains,
autrement dit cette semaine-là fut une vraie course
contre la montre, qui s’est soldée par un appartement en
plain centre, avec un Indien et un Français, et une vie
déjà bien organisée. Mais aussi un retard de sommeil
hallucinant !
Mais qu’est-ce que cette semaine valait la peine
d’être vécue !
Premiers cours, premiers contacts.
Mercredi 4 septembre, moins de 2 semaines après
mon arrivée, ce moment empreint d’inquiétude et
d’impatience arrive enfin : je rencontre mes classes.
C’est un moment assez incroyable : se retrouver en face
de 20 jeunes Américains à peine plus jeune que soi, et de
subitement être leur prof, de se retrouver d’un seul coup
au devant de la scène, responsable de ce groupe et de
l’ambiance dans la salle. Mais une fois de plus tout
s’est bien passé, après quelques mots, quelques sourires
et quelques jours d’adaptation le groupe s’est formé, et
désormais je vais donner mes cours, impatiente de voir où
la classe va aboutir. Que ce soit des discussions ou des
activités plus ludiques, chaque classe est une
découverte, un partage où chacun apporte un peu de soi.
En peu de mots : je m’éclate.
Mais si nous sommes déjà un groupe aussi soudé,
c’est peut-être aussi en raison des événements récents.
Le choc et la souffrance des Américains
Ecrire en quelques lignes, résumer l’émotion et la
douleur de ces derniers jours paraît une mission
impossible. En l’espace de quelques instants la vie s’est
arrêtée ici, comme partout ailleurs dans le pays. C’était
pourtant une journée superbe, un de ces derniers jours
d’été où on se lève le sourire aux lèvres. Mais voilà,
pendant que j’écrivais des mails pour raconter cela,
quelqu’un est arrivé comme une bombe dans mon bureau et
m’a raconté ce qui s’était passé. De tout mardi, personne
ici n’a pu détacher son regard des images qui défilaient
à la télé, si ce n’est pour appeler, en tremblant
d’émotion, ceux qui pouvaient être directement atteint.
Et partout dans Providence, on a assisté à des scènes
terribles et magnifiques, de gens s’étreignant dans la
rue, de larmes silencieuses ou de sanglots
incontrôlables. Et en même temps tout le monde
s’organisait, prenait en main des actions d’aide, de
soutien aux étudiants touchés personnellement, de
discussion. Brown s’est révélée être comme une famille où
personne ne pouvait rester seul, isolé dans sa douleur.
Quelle solidarité !
Je sais que je suis dans un lieu privilégié, parce qu’ici
les voix se lèvent pour réclamer des solutions
pacifiques. Si les drapeaux américains prolifèrent, je
croise aussi tous les jours des jeunes avec des petits
slogans épinglés au T-shirt ou au sac disant : « Think
before action ». J’ai aussi assisté à plusieurs
célébrations multiconfessionnelles, où toutes croyances
mélangées les gens priaient ou méditaient sur ce qui
s’était passé ou ce qui se passerait.
En cours, la situation a été aussi très dure, mais si
bouleversante. Aucun de mes étudiants n’a été touché
directement, et mercredi tous étaient en cours, les yeux
rouges, le regard las et empli de souffrance, mais ils
ont vaillamment continué les cours, sans se laisser aller
à des réactions de haine ou de désespoir. Je leur ai lu
le vendredi l’éditorial du Monde « nous sommes tous des
Américains » et certains ont éclaté en sanglots, mais
aussi m’ont remerciée de leur montrer qu’ils n’étaient
pas seuls.
Mais je sais aussi que je suis à Brown, et qu’ailleurs
dans le pays les choses ne se passent pas comme ça.
Seulement des étudiants comme les miens, qui se posent
les bonnes questions, qui souffrent mais gardent espoir,
me permettent à moi aussi de rester confiante dans
l’avenir.
On ne souhaiterait jamais vivre des jours comme ceux qui
viennent de se passer, mais pour moi ces jours derniers
ont été aussi un moment de révélation sur les Américains.
Je reste admirative devant ces jeunes qui se montrent si
forts, si courageux et réfléchis, si loin du cliché de
l’Américain moyen, ignorant et incapable de voir plus
loin que l’écran de sa télévision. Tout comme je vous
conseille de regarder le New York Times
(http://www.nytimes.com/ )de dimanche dernier. Les
témoignages dedans donnent l’ampleur des valeurs qui
persistent dans ce pays qu’on dénigre si souvent. Je ne
sais pas ce qu’on dit en France, mais j’espère qu’on
parle aussi de cela, et pas seulement des réactions de
haine, du militarisme outrancier et des discours
terribles tenus par la Maison Blanche. Parce que les
Etats-Unis aujourd’hui, ce n’est pas que ça.
ARCHIVES
[2001-08-18]
[Avant le depart!]
Bonjour!
Avant toute chose, je me presente : Catherine, 24 ans, lyonnaise
d'adoption, je viens de passer les concours d'enseignement et je profite
de l'annee de report de stage -facile a obtenir- pour m'evader encore
une fois a l'etranger. Ce sejour n'est pas le premier : j'ai deja passe
un an a l'universite de Virginie aux US en tant que lectrice. La vraie
nouveaute pour moi cette annee c'est l'universite ou je me rends!
Pour ceux qu'une telle experience interesse, il faut d'ores et deja
savoir qu'un tel voyage ne s'improvise pas : dans la plupart des cas il
s'agit d'echanges entre les universites. Des le mois de janvier, voire
parfois plus tot, des dossiers doivent etre remplis. Une fois la
candidature acceptee, il faut s'occuper de tous les petits details
administratifs : visa pour les francais, contrat avec l'universite
americaine. Puis viennent les details pratoques : billet d'avion, argent
a prevoir avant les premiers salaires, logement au moins pour le debut...
Me voila donc a J-5 du depart. Pour etre honnete, rien n'est vraiment
pret : des piles informes s'amoncellent dans ma chambre, tous les
papiers s'ingenient a disparaitre, et pour compliquer les choses je dois
aussi prevoir le depart de mon chat : vaccins, certificats de bonne
sante, sans compter tous les probleme de transport que ca pose...
Autant dire qu'a 5 jours du depart la seule question que je me pose est
: comment vais-je faire??? en m'arrachant les cheveux. Une semaine de
sursis serait la bienvenue, meme si j'ai de plus en plus hate de
decouvrir Providence, le campus de Brown, mes collegues de travail, mes
futures classes...
Voila pour aujourd'hui! Je retourne a mes bagages, mes aux revoir et mes
inquietudes! A bientot des US pour vous donner plein de bonnes nouvelles
et vous faire decouvrir la vie de Brown University!
Catherine