Le départ
Il est vrai que le nombre d'étudiants
souhaitant s'exiler, ne serait-ce qu'un
an, dans un pays de leur choix, dépasse de loin celui des étudiants dont le souhait est
exhaussé. Mais que cela ne déconcerte personne, il ne tient qu'à l'étudiant de faire
valoir sa motivation pour être sélectionné et pour décrocher une timbale assez peu
remplie, mais remplie quand même : la bourse ERASMUS.
Ça, c'est lorsqu'on est en finale, que l'essai est transformé et qu'il ne reste plus que
deux formalités à effectuer en France : son inscription à l'université et la
réservation de son vol pour la mi-septembre.
Et ensuite ? Ensuite, cela dépend du pays où l'on va. Pour moi, j'ai eu l'immense
plaisir de me dégoter un petit coin de paradis appelé Eire, ou République d'Irlande.
Sur cette petite île peuplée de grands hommes et de grandes femmes, il existe une petite
ville à une demi-heure de Dublin en voiture, dotée d'une université qui s'inscrit comme
le contraire de l'université d'où je venais. L'Université de Maynooth est grande en
superficie, petite en nombre d'étudiants, principalement recouverte de gazon, aux
bâtiments originaux ou deux fois centenaires, puisque Maynooth est né en 1801 sous le
nom Saint Patrick's College. Attention, cette composante, formant des séminaristes,
existe encore.
Où dormir ?
Bien. Vous voici dans le contexte de mon
arrivée en Irlande. Quelles sont les difficultés rencontrées ? Tout d'abord, parlons du
logement. Selon la définition ERASMUS le logement est une question qui se résout soit en
avril-mai en se portant candidat pour une chambre sur le campus, ou en septembre en
partant à la chasse. J'ai opté pour un appartement sur le campus. Quand je dis
appartement, je précise : un appartement comprend cinq chambres de même taille, deux
salles de bains et une partie commune fort sympathique. Je la conseille à ceux qui
souhaitent à la fois rester proche de l'université et entouré de plus de 200
étudiants. Je la déconseille à ceux qui veulent rester isolés.
Bien entendu, tout logement a des inconvénients. Sur le campus (ou University Village
Apartments), le problème est qu'ils ne peuvent pas gérer 240 étudiants. Mais ce n'est
rien face à ce que j'ai pu vivre en France, lorsque j'habitais en Amiens.
Petit conseil aux plus frileux : le chauffage est électrique et pompe méchamment sur
votre caution (voir ci-dessous).
Le logement chez l'habitant n'est pas non plus à éviter, cela dit. Je n'ai entendu
personne se plaindre.
Les poches : vides ou
pleines ?
Un conseil : ne partez pas sans votre carte
VISA et vos traveller's cheques. Bien qu'il existe toujours une commission, il vaut mieux
se prémunir des dépenses inattendues. Le logement sur campus se paie par semestre, à
raison d'environ £ 700 (IRL) par semestre et d'une caution de £ 250 (IRL) sur laquelle
seront retirées vos charges.
Ne comptez pas sur la bourse ERASMUS pour payer votre petit déjeuner. Elle est virée sur
votre compte français en trois fois (janvier, juin, septembre) et Bruxelles vous offre de
quoi payer le voyage retour en basse saison (donc, environ 1.000 Fr.)
Vous
l'aurez donc compris, vous avez le choix entre accumuler avant votre départ de quoi tenir
l'année, ou à prendre un travail à temps partiel une fois là-bas. Et c'est là que,
sans devenir problématique, ça se complique.
Le budget d'un étudiant moyen est de 3.000 Fr. par mois en moyenne. Comprenez donc : il
vous faudra au minimum 30.000 Fr. pour survivre un an.
La vie en Irlande n'est pas plus chère qu'en France, elle est juste moins chère parfois,
et paradoxalement trop chère ailleurs. La nourriture au détail est plus chère, par
exemple, mais le réseau de transport en commun est moins cher qu'à Paris, et plus
pratique. Bon nombre d'aliments seront moins chers, tandis que d'autres sont hors de prix.
Les étudiants ont un avantage considérable en Irlande alors qu'en France… Hé bien,
parlons un peu de la Carte Jeune…
Vous cherchez du
travail ?
Pas de problème ! Oubliez les phrases
ressassées du genre « un Irlandais sur quatre est au chômage ». C'est dépassé et
outrageusement erroné. L'Irlande, jusqu'en mai 2000, n'avait aucun salaire minimum
garanti, mais une grève (passée inaperçue) a encouragé l'Etat à instaurer un salaire
horaire minimum de £ 4.5 (IRL), soit 37.5Fr environ (je n'ai plus le chiffre exact en
tête). Avant, les gros employeurs (Mac Donalds, Burger King i tutti quanti) embauchaient
à £4, ce que les Irlandais refusaient, laissant ainsi la place aux étrangers, dont la
première préoccupation était de payer leur loyer.
A présent, la situation n'est plus aussi claire. Exemple type : en octobre 99, lorsque
Bewley's, une célèbre chaîne de restaurants/cafés/pâtissiers/boulangers (oui, tout en
un), m'a engagé, la moitié des employés étaient du continent. A présent, les
employés sont majoritairement irlandais, mais cette constatation est quelque peu
trompeuse puisque c'était en été et les étudiants étrangers avaient quitté
l'Irlande.
Le
moment le plus propice pour chercher un boulot est septembre. En octobre, c'est trop tard
pour un emploi à Maynooth, mais Dublin est toujours (quand je dis toujours, ça veut dire
TOUJOURS) à court de personnel. N'attendez donc pas, car le bus pour Dublin est…
lent, surtout aux heures de pointe.
Autre chose : les impôts sont payés sur la paie directement, cette dernière étant
distribuée toutes les deux semaines le jeudi. En tant qu'étudiant ERASMUS, vous êtes
exonéré de taxe en Irlande, il vous faut déclarer votre travail auprès du bureau des
taxes (ou Tax Office) afin de recevoir une carte de travailleur (format carte de crédit,
magnifique !). N'attendez pas trop, car si vous n'avez pas rempli un certain formulaire
(appelé « P » quelque chose) vous finirez par perdre 50 % de votre paie en taxes !
Bon, et
l'université, alors ?
C'est
formidable. Des gens souriants, des enseignants très pédagogues, une administration fort
sympathique, c'est un paradis étudiant ! Les associations, si elles manquent d'ambition,
ont de l'enthousiasme à revendre et des capacités budgétaires considérables.
Le monde associatif est très structuré et ne se prend pas les pattes dans l'engrenage
des « sympathies » politiques. Il y a UN syndicat étudiant, régit par des étudiants
aux tendances politiques diverses et par les associations, à un niveau moindre. Eh oui !
on est loin de la gueguerre entre syndicats fainéants et associations incapables !
En tant qu'étudiant ERASMUS, vous ne payez pas de frais d'inscription, mais sachez que
les Irlandais payent huit fois ce que votre inscription en France vous aura coûté (c'est
l'estimation d'un de mes camarades, démentie plus tard par un autre, mais il y avait des
chances qu'il soit boursier…)
Etre étudiant à Maynooth c'est posséder un compte E-mail, avoir accès aux mille et une
activités sur le campus, c'est économiser sur l'achat d'une bière dans le génialissime
pub de la fac (tenu par le syndicat étudiant, ho !).
La bibliothèque est riche en informations, l'indexation des ouvrages se fait via un site
web interne, sur des machines très récentes. Et surtout, elle est silencieuse.
Il y a une piscine, un gymnase, un hall musique (six pianos !), une petite cafétéria, un
grand restaurant universitaire (géré par les étudiants), le pub, le hall de concert, et
un forum associatif (Fair's Day) fabuleux.
Le campus est divisé en deux, entre le campus nord (ou new campus, on dit les deux) et le
campus sud (ou old campus). Il faut aimer marcher, et j'ai pu en profiter, d'ailleurs !
L'université, de par son grand âge, profite d'un visitor centre en été et regorge
d'endroits magiques qui laissent rêver…
Et les cours ? Ma foi, les cours sont… irréprochables. Les étudiants s'y
investissent bien plus que nous ne saurions l'imaginer.
Je l'ai dit, un paradis étudiant.
Et la vie,
là-bas ?
J'ai passé à Maynooth la plus belle année de mon existence. Une petite ville qui ne
manque de rien (il y a même trois pubs ex-campus, pour vous dire), une atmosphère de
bonne humeur et de prospérité, un environnement si agréable que je n'avais qu'une
envie, c'était d'y rester.
Et croyez-moi, tous les étudiants ERASMUS se le disent à un moment ou un autre.
Et si vous avez la chance d'aller étudier en Irlande, et plus particulièrement à
Maynooth, sachez ceci : il n'existe pas de meilleur endroit au monde pour soigner le
stress, même en période d'examen.
Je ne souhaite pas bon courage à quiconque a la chance d'y aller, je dis « profites-en
tant que tu peux et garde ton courage pour le retour. »
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