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L'association des
Anglicistes
Première partie :
Les confessions d'un président d'association
Lorsque
Lauric [NDLR: Lauric Henneton, webmaster du présent site] m'a demandé d'écrire un petit
topo sur l'utilité d'une association réunissant les anglicistes d'une filière
universitaire, j'étais stupéfait.
Non pas que la demande de Lauric me surprenait (quoique ce fut un peu le cas), mais le
concept même d'association a été mis à rude épreuve depuis deux ans, en tout cas à
l'Université Paris XII.
Avant tout, je tiens à préciser certains détails : je suis fou. Certains parleront
d'altruisme, mais je reste sur « fou ». Je persiste à croire que le mode « associatif
» est viable. Si aujourd'hui, je dirige une association d'auteurs et de traducteurs,
l'ÆTP (http://www.aetp.net/), en janvier 1998, quelques mois après avoir radicalement
changé de filière (de l'électronique, je me retrouvais en anglais), je me lançai corps
et âme dans le renouveau d'une association d'anglicistes née dans la filière d'anglais
de l'université, et laissée à l'abandon depuis trois ans.
Une
association imparfaite et comateuse
Elle était en
sommeil, sans responsables, portait l'horrible nom « Les Anglicistes Associés », et
allait renaître avec, à sa tête, un étudiant qui, avant d'intégrer la deuxième
année de DEUG, avait obtenu un… D.U.T. Génie Electrique ?
Et les chances n'étaient pas de notre côté : aucun local propre à nous, peu de bras et
de matière grise au commencement (nous étions quatre).
Tout s'arrangea rapidement. La première chose à savoir lorsqu'on se lance dans
l'associatif, c'est que sans passion, tous les efforts n'y feront rien : une association
morte reste une association morte. Et des atouts, nous en avions. De quoi mettre des
idées en pratique et sensibiliser les étudiants. Pleins de bonnes choses au programme !
Tout d'abord, un compte avec de l'argent, saluons là l'honnêteté des responsables
précédents. Oui, ça aide.
Ensuite, un moyen de faire rentrer de l'argent dans la caisse. L'adhésion ? Oui, ça
sert. Vente de thé, café, sucrerie ? Oui, ça vaut le coup.
Finalement, des services financés par les adhésions et les ventes, donc, comprenons-nous
bien, GRATUITS (ou à prix coûtant).
Notez que nous vendions tout avec un minimum de marge (2 Fr. le café, par exemple).
Evidemment, tout ceci n'a rien à voir avec l'intérêt que nous portions pour l'anglais.
Adhérents
: votre avis est primordial
First order of
business : il fallait que nous soyons présents. Un sondage et des pubs ? why not ? 600
exemplaires d'un sondage ciblant les étudiants en anglais, 60 réponses. Non, non, 10%,
c'est bien, en vérité !
Et puis le local : il s'agissait d'une salle utilisée par le département d'anglais pour
le monitorat et le tutorat des étudiants. Elle servait aussi de placard pour les ouvrages
de référence cédés par les enseignants ayant quitté le département depuis…
disons quelques années. Nous avions donc à disposition une collection d'ouvrages fort
sympathique.
Les anglicistes ayant opté pour un régime à base de films en Version Originale, nous
n'allions pas manquer à notre parole, n'est-ce pas ?
Le sondage nous aiguilla un peu plus sur les désirs des anglicistes : des sorties
intéressantes, une revue, mais surtout des voyages. Dont acte.
La machine est
en route
Principe de
l'angliciste : les recherches, il peut les faire tout seul. Le travail, il peut le faire
tout seul. Alors… il reste tout seul.
Un tel principe rend le nom de l'association caduc. Donc… ? on change de nom. Les
Anglicistes Associés, affectueusement surnommés Les Anglicistes Anonymes, forment à
présent l'Association des Anglicistes de Paris XII.
Le local est à disposition des étudiants, mais il est au 3e étage.
Au fil des mois, nous accumulons des documents relatifs aux différents cursus, des
informations, un journal.
Un journal ? non ! un palace pour fautes de frappe intitulé « The Créteil Chronicles
», mélangeant information et bonne humeur.
Principe de l'association : ne pas se prendre au sérieux quand on est au sein de
l'université, mais ne pas non plus bouder le sérieux, ho !
Aujourd'hui, cette époque me paraît avoir
été synonyme de tranquillité et
prospérité. Les étudiants étaient
néanmoins réfractaires à l'association,
problème exacerbé depuis par quelques magouilles ayant
très, TRES mal tournées.
La machine était en route, et il en aura fallu beaucoup pour l'arrêter.
Eire,
ou le début de l'ère prospère
Sur un coup de
tête, nous tentions d'organiser un voyage. Où ? Londres ? fait et refait par d'autres
associations (un comble !). New York ? très drôle… Sydney ? irréel.
Dublin ? Ah, là… je m'y vois déjà. A une heure d'avion, l'Irlande était un pays
qui commençait à avoir la cote du point de vue touristique. Certains de nos membres y
étaient allés et se proposèrent pour préparer le voyage.
Principe du voyage associatif : ne jamais, je dis bien jamais, passer par un prestataire
de service (i.e. une petite agence de voyages). Faire tout soi-même est… une
épreuve, mais c'est aussi gratifiant. Pour le prestataire, voir le principe de la chute.
Le sommet de la
montagne
C'est à cette
époque que l'association explosa en projets. Le voyage eut l'effet inattendu d'attirer
Lauric dans nos filets. Et il n'était pas seul.
Passé le voyage en Irlande et les vacances, nous repartîmes en septembre avec mille et
une idées et des gens formidables pour les réaliser. Lauric apporta une contribution
considérable. Véritable pionnier de l'associatif étudiant sur Internet, il nous
concocta un site magnifique, fantaisiste et poétique, reprenant d'abord notre périple en
Irlande pour le compléter ensuite de diverses rubriques. Un seul hic : c'était avant la
démocratisation d'Internet. Quel tabac aurait fait ce site de nos jours !
(Si vous souhaitez visiter le site en question, n'hésitez à implorer Lauric, ou votre
humble serviteur. Peut-être nous ferons-vous la fleur de le mettre en ligne.)
Le journal brillait aussi sous l'impulsion d'un Lauric passionné, secondé de près par
quelques anglicistes ayant le cœur sur la main et… quoi, j'en fais trop ?
Non, en fait, l'association a su profiter d'un envol qui n'était dû qu'à la passion des
nouveaux adhérents. Jusqu'à la chute.
La chute
Principe de la
chute : se laisser influencer par moins scrupuleux et trop ambitieux ne permet pas
d'obtenir de meilleurs résultats. Surtout lorsqu'on est honnête et « à but non
lucratif ».
Profitant de l'élan, je pris la décision d'impliquer l'association dans un voyage au
ski. Pas de risque financier, pas de contrat signé. Nous aidions une association à
remplir deux cars en période de Noël.
Du ski ? Oops. Mauvaise réponse. Rien à voir avec l'anglais.
Tandis que notre vidéothèque gonflait à vue d'œil et que le Chronicles
s'embellissait, ce voyage au ski, une grossière erreur de ma part, faisait tâche.
Pour ma défense, j'avoue avoir été influencé par la mode du moment. Toutes les
associations faisaient des voyages !
Ce qui ne diminue en rien ma faute. Et c'est là le principe le plus important concernant
l'association: écouter est une chose, discuter en est une autre. Il n'y a pas vraiment eu
de discussion, et on en est même venu à déceler des personnes mal intentionnées au
sein de l'association.
Ces mêmes personnes ont payé le prix fort. Elles se sont retrouvées à la tête d'une
association que j'ai quittée pour cause d'épuisement moral, et ont démoli le travail
accompli en un an très exactement. Et, contrairement à ce qu'on m'a dit à l'époque, ce
travail n'était pas uniquement le mien, mais celui des membres de l'association ayant
œuvré pour son bien.
Seconde partie :
Une association ? pourquoi ?
Ne vous
méprenez pas sur mes confessions, une association d'anglicistes est un trésor plus
qu'une croix à porter. D'ailleurs, si c'était à refaire, je relancerais l'association.
Elle n'attend que cela…
Pour mieux comprendre l'intérêt d'une association (et pour nuancer ma confession), il
faut bien entendu être motivé par l'anglais, en tant que langue, en tant que culture
(anglaise, irlandaise, écossaise, américaine, canadienne, australienne… liste
exhaustive, encore que…).
Le « mainstream » de l'anglais représente le moyennement bon et le médiocre de la
globalité de cette culture aussi profonde que variée. Le public expérimente ce que les
médias laissent passer, et ce n'est malheureusement pas grand-chose. A nous, anglicistes
de profession et/ou de passion, d'entretenir le bon et le très bon.
Je réalise (ah ! anglicisme adopté par la langue française, quoi que son utilisation
reste contestable), pardon, je me rends compte de la subjectivité qu'implique ce qui
précède. Toute chose n'est pas forcément mauvaise ou bonne selon sa provenance. Faut-il
rejeter la totalité de la culture américaine importée en France tonne après tonne ?
Faut-il encenser le vrai, le pur British ?
Si oui, j'affirme dès maintenant mon appartenance au clan des Irlandais. Si non, je
m'abstiens.
D'ailleurs, ce n'est pas une si mauvaise idée de se prononcer sur ses préférences…
Réfléchissons un instant sur la subjectivité de l'angliciste…
Bien sûr ! S'il fallait lancer une association d'anglicistes, il faudrait être le plus
diversifié possible ! Le monde politique est victime d'une dichotomie pathétique et
pathologique, se pourrait-il que les dichotomies linguistiques et culturelles puisse
rendre une association d'anglicistes plus puissante ?
Vous cherchez une adaptation de Shakespeare ? allez voir par ici ! Vous vous documentez
sur le pouvoir législatif aux Etats-Unis ? C'est par là ! Des infos sur l'émancipation
des catholiques en Irlande ? Tout droit, mon ami !
Partager sa
passion, sa connaissance, est une sensation sans égale. Rencontrer des anglicistes dont
la vocation est d'enseigner, de traduire, d'étudier, et échanger, en l'espace de
quelques heures, des points de vue, des informations, est très gratifiant.
Un conseil :
tentez le coup, adhérer à une association d'anglicistes. Si ce n'est pas possible, ma
foi, créez une association. Et passez le message. Tiens, je me suis emporté. Navré
d'avoir divagué ainsi.
Lionel Beck,
cre@ctivated.com
Copyright
2000-2001 (Lionel Beck/Projet Albion)
Si vous souhaitez
envoyer vos commentaires au sujet de cette rubrique: lionel.beck [a] creactivated.com
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